Monday, January 08, 2007

Le Potlatch : des textes et des vidéos.

Thème : La culture.

Si vous avez envie de comprendre cela... :


Masque à transformation du XIXème siècle, Ancienne collection Claude Lévi-Strauss, H. 34 cm ; L. 53 cm fermé et 130 cm ouvert car il est muni d'un dispositif simple qui permet d'ouvrir et de fermer deux volets latéraux. Fermé, il représente un corbeau ; déployé, il laisse apparaître un visage humain.

... suivez-moi. Promis vous ne le regretterez pas...

Qu'est-ce qu'un potlatch ?


Document 1 : "Dans les économies et dans les droits qui ont précédé les nôtres, on ne constate pour ainsi dire jamais de simples échanges de biens, de richesses et de produits au cours d'un marché passé entre les individus. D'abord, ce ne sont pas des individus, ce sont des collectivités qui s'obligent mutuellement, échangent et contractent les personnes présentes au contrat sont des personnes morales clans, tribus, familles, qui s'affrontent et s'opposent soit en groupes se faisant face sur le terrain même, soit par l'intermédiaire de leurs chefs, soit de ces deux façons à la fois .
De plus, ce qu'ils échangent, ce n'est pas exclusivement des biens et des richesses, des meubles et des immeubles, des choses utiles économiquement. Ce sont avant tout des politesses, des festins, des rites, des services militaires, des femmes, des enfants, des danses, des fêtes, des foires dont le marché n'est qu'un des moments et où la circulation des richesses n'est qu'un des termes d'un contrat beaucoup plus général et beaucoup plus permanent.

Enfin, ces prestations et contre-prestations s'engagent sous une forme plutôt volontaire, par des présents, des cadeaux, bien qu'elles soient au fond rigoureusement obligatoires, à peine de guerre privée ou publique. Nous avons proposé d'appeler tout ceci le système des prestations totales. Le type le plus pur de ces institutions nous parait être représenté par l'alliance des deux phratries dans les tribus australiennes ou nord-américaines en général, où les rites, les mariages, la succession aux biens, les liens de droit et d'intérêt, rangs militaires et sacerdotaux, tout est complémentaire et suppose la collaboration des deux moitiés de la tribu.

LesTlinkit et les Haïda, deux tribus du nord-ouest américain expriment fortement la nature de
ces pratiques en disant que « les deux phratries se montrent respect ». Mais, dans ces deux dernières tribus du nord-ouest américain et dans toute cette région apparaît une forme typique certes, mais évoluée et relativement rare, de ces prestations totales. Nous avons proposé de l'appeler potlatch, comme font d'ailleurs les auteurs américains se servant du nom chinook devenu partie du langage courant des Blancs et des Indiens de Vancouver à l'Alaska. «Potlatch» veut dire essentiellement « nourrir », « consommer ». Ces tribus, fort riches, qui vivent dans les îles ou sur la côte ou entre les Rocheuses et la côte, passent leur hiver dans une perpétuelle fête : banquets, foires et marchés, qui sont en même temps l'assemblée solennelle de la tribu. Celle-ci y est rangée suivant ses confréries hiérarchiques, ses sociétés secrètes, souvent confondues avec les premières et avec les clans ; et tout, clans, mariages, initiations, séances de shamanisme et du culte des grands dieux, des totems ou des ancêtres collectifs ou individuels du clan, tout se mêle en un inextricable lacis de rites, de prestations juridiques et économiques, de fixations de rangs politiques dans la société des hommes, dans la tribu et dans les confédérations de tribus et même internationalement.

Mais ce qui est remarquable dans ces tribus, c'est le principe de la rivalité et de l'antagonisme qui domine toutes ces pratiques. On y va jusqu'à la bataille, jusqu'à la mise à mort des chefs et nobles qui s'affrontent ainsi. On y va d'autre part jusqu'à la destruction purement somptuaire des richesses accumulées pour éclipser le chef rival en même temps qu'associé (d'ordinaire grand-père, beau-père ou gendre). Il y a prestation totale en ce sens que c'est bien tout le clan qui contracte pour tous, pour tout ce qu'il possède et pour tout ce qu'il fait, par l'intermédiaire de son chef. Mais cette prestation revêt de la part du chef une allure agonistique très marquée. Elle est essentiellement usuraire et somptuaire et l'on assiste avant tout à une lutte des nobles pour assurer entre eux une hiérarchie dont ultérieurement profite leur clan."

Source : Marcel Mauss, Essai sur le don : formes et raisons de l'échange dans les sociétés archaïques, Paris, PUF, 1985 (1ère édition 1950).
nota : si problème de vocabulaire, utiliser le Trésor de la Langue Française (TLF) dans les outils de SES-BANK, et en complément le : glossaire du musée Branly

Travail guidé :
1- Produisez un tableau comparatif entre l'échange marchand de nos sociétés et l'échange dans les sociétés étudiés par Marcel Mauss.
2- Justifiez l'appellation de "prestations totales" utlisée par Mauss.

Document 2 :
"Le potlatch incluait les dix-huit tribus de Kwakwaka'wakw* et durait quatre jours ou plus (…) Des festins accompagnent également un potlatch, et les événements suivent un ordre précis. Le potlatch est divisé en deux séries de danses (…) Pour finir, les cadeaux, extraits de plusieurs caisses, sont éparpillés sur le plancher de la Grande maison et distribués avec de l'argent, d'abord aux Chefs, puis dans l'ordre, aux Anciens, aux chanteurs et aux invités. Les invités reçoivent des présents attestant des événements qui ont eu lieu. En tant que témoin, il vous incombe de vous rappeler ces événements et de transmettre la connaissance. Plus on distribue de cadeaux, plus grand est le prestige obtenu par l'hôte du potlatch. C'est un moment de grande fierté et l'occasion de montrer les masques et les danses propres à la famille qui donne le potlatch. (…).

Le gouvernement Canadien interdit l'organisation de potlatch en 1885, en partie parce qu'ils croyaient que ces cérémonies nuisaient à la croissance économique du pays. Les non autochtones et les entreprises tributaires du marché, en particulier les conserveries locales, avaient besoin de travailleurs autochtones. Ces entreprises ne pouvaient accepter l'inconséquence d'une main-d'œuvre autochtone, qui devait consacrer son temps et son énergie au potlatch. (…) Du point de vue des Kwakwaka'wakw, il fallait un gigantesque effort économique pour accumuler les objets offerts lors d'un potlatch. Les Kwakwaka'wakw, toujours très travailleurs, commencèrent bientôt à s'inspirer du système économique européen pour renforcer et étendre les potlatchs, achetant des objets donnés aux "témoins" assistant aux cérémonies comme moyen de paiement pour se rappeler et enregistrer les événements qui s'y produisaient. (...)

Les masques et autres biens confisqués furent transportés en plein air par bateau, puis exposés sur les bancs de la salle paroissiale de l'église anglicane d'Alert Bay. Il fut particulièrement pénible pour les Kwakwaka'wakw de voir tous ces biens entassés en plein air, sur le bateau, car il s'agissait d'objets sacrés, considérés comme des trésors. Par respect pour la tradition, ils devaient être rangés à l'abri, dans des boîtes en cèdre, lorsque personne ne s'en servait "

Source : Musée virtuel du Canada.
*prononcez Kwakwatiwak, ces Amérindiens sont aussi nommés Kwakiutl dans la littérature.

Travail guidé :
1- A quelle date est interdite la cérémonie du potlatch ?
2- Qu'est-ce qui justifie son interdiction ?
3- Quel raisonnement opposent les Kwakwatiwak à l'interdiction dans ce document ?
4- Leurs arguments sont-ils conformes à la logique du potlatch décrite par Mauss ?
5- Identifiez le concept sociologique qui décrit adéquatement ce qui s'est produit.

Document 3 :
Histoire passionnante d'un masque Kwakwaka'wakw utilisé lors de potlatch, vidéo Musée du Quai Branly et Arte, 23'13", 2001. A regardez absolument, ne serait-ce que pour les images d'archives de 1914 ! Je sais je ne suis pas objective... les lecteurs attentifs savent que j'adore les masques et que les arts et l'ethnologie sont mes vraies passions mais bon je vous jure que cela vaut carrément le détour.

Travail guidé :
1- Le masque peut-il avoir un sens considéré isolément ?
2- Les potlatch sont de nouveau autorisés à quelle date ?
3- Le corbeau est il un animal maléfique dans cette culture ? Pourquoi ?
4- Le Potlatch de 1997 :
* qu'est-ce que la Big House ?
* Que représentent les mâts à l'intérieur de la Big House ?
* Repérez les différentes phases de la danse où l'ancêtre quitte sa forme animale pour s'incarner en humain.

Document 4 : une culture qui n'est pas morte.
la culture Haïda

Repérez les éléments qui apparaissent communs à la culture Haïda et aux Kwakwaka'wakw

Alors ça vous a plu cette découverte du potlatch ?
Qui a envie de devenir ethnologue ?

Labels: ,

0 Comments:

Post a Comment

<< Home